Mes journées débutent trop tôt alors que je n'ai rien à faire et je pense à ceux qui commencent la journée pour aller travailler, ceux qui terminent la journée car ils ont fini de travailler. Ils se croisent presque sous mes yeux d'insomniaque pendant que mes pensées rongent mon cerveau et que mes pensées sont les plus terre à terre qui soient.
Je n'avais jamais réalisé combien il était déstabilisant de perdre une fonction dans son corps. J'avais eu l'expérience d'une fracture ou autre accident ou opération qui immobilise une partie du corps mais jamais cette expérience de perdre temporairement la fonction d'un organe.
Je n'ai plus à faire pipi mais mon cerveau ne l'a pas compris.
Plusieurs dizaines d'années de conditionnement ne doivent pas s'effacer ainsi, surtout que j'appartiens à une génération où les mères éduquaient leurs enfants à être "propres" avec fermeté et là, depuis six jours je dois dire à mon cerveau qu'il n'a plus à s'occuper de ça.
Je dois lui dire : - Laisse tomber, je sais que j'ai envie de faire pipi, mais tu peux te brosser, je n'irai pas. Alors je lui dis, mais avant même que je lui ai dit, j'ai déjà senti mon corps qui se mettait en marche, mon dos qui se soulevait, mes bras qui s'appuyaient, tout mon corps qui se mettait en route pour les toilettes. Cela ne dure qu'une fraction de seconde à peine mais ça m'énerve, ça m'use. J'engueule mon cerveau mais il s'en fout totalement. Il est programmé et il fait son job comme un vieil ouvrier consciencieux.
Je voudrais que ma vessie ne se rebelle plus, qu'elle ne me parle plus et qu'elle accepte d'être assistée pour encore presque deux semaines.
Hier Jno ma dit le mot qui tue.
Il m'a dit : - J'arrive pour t'aider à la cuisine, je vais juste pisser avant. Je lui ai répondu : - Quelle chance tu as, moi j'en rêve de pisser !
Un truc si simple alors que tout le monde rêve de gagner au loto, moi mon rêve c'est de pisser.
Je n'avais jamais réalisé combien il était déstabilisant de perdre une fonction dans son corps. J'avais eu l'expérience d'une fracture ou autre accident ou opération qui immobilise une partie du corps mais jamais cette expérience de perdre temporairement la fonction d'un organe.
Je n'ai plus à faire pipi mais mon cerveau ne l'a pas compris.
Plusieurs dizaines d'années de conditionnement ne doivent pas s'effacer ainsi, surtout que j'appartiens à une génération où les mères éduquaient leurs enfants à être "propres" avec fermeté et là, depuis six jours je dois dire à mon cerveau qu'il n'a plus à s'occuper de ça.
Je dois lui dire : - Laisse tomber, je sais que j'ai envie de faire pipi, mais tu peux te brosser, je n'irai pas. Alors je lui dis, mais avant même que je lui ai dit, j'ai déjà senti mon corps qui se mettait en marche, mon dos qui se soulevait, mes bras qui s'appuyaient, tout mon corps qui se mettait en route pour les toilettes. Cela ne dure qu'une fraction de seconde à peine mais ça m'énerve, ça m'use. J'engueule mon cerveau mais il s'en fout totalement. Il est programmé et il fait son job comme un vieil ouvrier consciencieux.
Je voudrais que ma vessie ne se rebelle plus, qu'elle ne me parle plus et qu'elle accepte d'être assistée pour encore presque deux semaines.
Hier Jno ma dit le mot qui tue.
Il m'a dit : - J'arrive pour t'aider à la cuisine, je vais juste pisser avant. Je lui ai répondu : - Quelle chance tu as, moi j'en rêve de pisser !
Un truc si simple alors que tout le monde rêve de gagner au loto, moi mon rêve c'est de pisser.
Pour quand-même ne pas rester sur un billet qui littérairement, atteint je dois le reconnaître les limites d'une conversation de cour d'école maternelle, je vais terminer avec Samuel Beckett qui dans l'Innommable fait dire à son personnage qui n'est plus rien, un homme réduit à sa plus simple expression et qui a seulement la conscience d'avoir une conscience :
"Je ne peux pas continuer. Je vais continuer"
"Je ne peux pas continuer. Je vais continuer"
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