mardi 6 novembre 2018

La horde des chats noirs

Groupe des chats noirs du mal dans l'obscurité. Photo DR

J’ai croisé une horde de chats noirs. 

Enfin, je ne les ai pas croisés, je pense qu’ils sont venus de leur propre initiative et que leur initiative est vraiment injuste car a priori (sans accent) je n’ai rien contre les chats et même si ils sont noirs.
Ils ont dû organiser un événement sur Facebook et une nuit, tous les chats du Tarn et Garonne étaient sous ma fenêtre et ils hurlaient : - On va la faire chier la Moyen, on va la faire chier …  Enfin, ils n’hurlaient pas vraiment ça car déjà ce n’est pas correct d’employer le mot « chier » en langage humain même si en langage chat je pense que ça peut passer vu le plaisir qu’ils ont parfois à chier partout, mais surtout  c’est que les chats ne parlent pas en humain sauf pour Lewis Caroll qui croient à des contes idiots, les chats en vrai  ils miaulent.

Donc dans mon histoire de horde de chats noirs, ils hurlaient en miaulant un truc qui voulait dire exactement la même chose que « On va la faire chier la Moyen ».
Déjà quand vous avez un chat noir dans votre vie, c’est la plaie et pour s’en débarrasser, c’est une peu comme les punaises en automne, à moins de les aspirer vous devez vivre avec.
Mais une horde !!!!!! On doit mettre des années à se débarrasser de leurs sorts … on vit avec !
Je n’ai pas croisé qu’une hypothétique horde de chats noirs, je dis « hypothétique » car je dois être honnête et reconnaître que je ne les ai pas vus, ce qui est normal car voir un chat noir dans la nuit noire, même en horde, c’est impossible (on ne les voit pas mais on les sent) j'ai croisé le soir d’Halloween ce que je pense être la cause de la bourde qui pourrait être à l’origine de la horde de chats noirs.
Lorsque les enfants ont frappé à ma porte en criant  : « Un sort ou des bonbons », j’ai eu  l’idée imbécile de répondre : « Un sort ! »
Mon idée n’était pas imbécile d’ailleurs, elle était humanitaire.
Je venais d’avoir à l’esprit le kilo de bonbons que j’avais acheté en prévision de la soirée et ne pensais plus qu’à la santé de ces pauvres petits à qui j’allais bourrer les poches de gélatine de porc aux sucres saturés. Un sursaut humanitaire donc m’a amenée ce soir-là à me sacrifier et à préférer le sort qui m’était jeté au destin tragique de ces bambins innocents aux sourires de zombis.
C’est ainsi que les chats noirs ont été contactés sur leur réseau social, celui des chats noirs qui font chier les gens gentils #chatsnoirsquifontchierlesgensgentils et ils ont organisé ce fameux événement sous ma fenêtre en hurlant ce que vous savez.
Depuis je cherche à me débarrasser de ce sort épouvantable et aquaboniste.
Je l’échange contre tous les bonbons de gélatine de porc et saturés au sucre qui me restent. 

jeudi 1 novembre 2018

Un sentiment




Avertissement : Toute ressemblance avec des sentiments existant ou ayant existé n'est pas une pure coïncidence. 

J’ai compris un sentiment.
Ce sentiment de ne pas être soulagé par la mort d’un criminel qui vous a causé directement du tort et dont la mort lui aura permis d’échapper à toute explication, tout jugement, toute punition. Le mot « tort » est un peu minimaliste pour qualifier un crime, il faudrait en trouver un autre qui exprime mieux l’ignominie. Je ne l’ai pas trouvé, il y a des mots qui restent secs comme les douleurs.
Avant, quand j’entendais les médias parler de la déception et de la colère des victimes à la nouvelle de la disparition du criminel impliqué ou simplement soupçonné de l’être je ne comprenais pas la réaction de colère et de découragement de ses victimes et à chaque fois, je m’interrogeais sur mon incompréhension. Je me disais que puisque le criminel impliqué ou soupçonné de l’être était mort, l’affaire était classée  et sa mort permettait de passer à autre chose et d’oublier.
Je ne comprenais pas le désarroi  des victimes que l’on voyait  s’exprimer devant les micros et les caméras.
Je ne comprenais pas car je savais parfaitement que  cette incompréhension venait d’une pièce qui me manquait et que cette pièce était du domaine de l’intime et de l’indicible pour les victimes. C’était une pièce qui appartenait à l’histoire de gens qui ont rencontré des drames et j’étais soulagée de savoir que cette pièce n’appartenait qu’à eux et qu’elle m’était interdite.
Mais j’aurais néanmoins voulu les consoler en leur disant : ils sont morts, c’est terminé, cessez de vous tourmenter, ils ne vous tourmenteront plus.
Hier, j’ai senti mes poumons se fermer et le souffle me manquer, hier j’ai senti une barre dans ma poitrine et le désarroi immense d’être envahie par un silence.
Hier j’ai compris que ce sentiment longtemps incompris et ignoré était en moi.
La pièce qui me manquait s’était logée exactement là où il fallait pour me permettre de ressentir ces sensations intimes et indicibles de savoir qu’on ne pourra plus jamais savoir et qu’il va falloir continuer à vivre avec ses convictions mais aussi ses incertitudes.
J’aurais aimé ne jamais placer la pièce qui fait  tourner le mécanisme de ce sentiment abrutissant.