Je suis de nouveau surprise qu’un jury de sélection de
peinture puisse se justifier de son indépendance en disant qu’il a procédé à la
sélection des œuvres de manière anonyme.
Il y a deux raisons à ma surprise.
La première est qu’avec l’importance des réseaux sociaux et notamment Facebook, il me semble impossible de prétendre que l’on n’a jamais vu une œuvre proposée à la sélection auparavant. Oui, bien sur, il y a des artistes qui ne publient jamais rien, sûrement … ou des artistes qui n’exposent jamais … mais je n’en connais pas.
La première est qu’avec l’importance des réseaux sociaux et notamment Facebook, il me semble impossible de prétendre que l’on n’a jamais vu une œuvre proposée à la sélection auparavant. Oui, bien sur, il y a des artistes qui ne publient jamais rien, sûrement … ou des artistes qui n’exposent jamais … mais je n’en connais pas.
La deuxième raison est que le propre d’un artiste est d’avoir
un style. Ou en tout cas, ce serait souhaitable. On peut avoir cette exigence
surtout pour un jury de sélection.
Alors comment une sélection peut elle être anonyme ????
Est ce que le fait de passer un coup de tampon sur sa
signature dans un logiciel de retouche peut suffire à effacer le style d’un
artiste et rendre impartial un jury de sélection ?
Je ne peux pas y croire. Ou alors le monde de l’art est
foutu.
Je me suis posée sur mon canapé, j’ai fermé les yeux et j’ai
visualisé les œuvres des aquarellistes que je connais et dont je peux donner
les noms en regardant une de leur œuvre. En trente secondes, j’en avais déjà
une dizaine. Je me suis arrêtée là car la vérification était suffisante.
Je n’ai pas fait le jeu avec Matisse, Chagall, Picasso, Monet ou Van Gogh cela aurait été trop facile et puis on m’aurait taxée de prétentieuse. (ça arrive …)
Je n’ai pas fait le jeu avec Matisse, Chagall, Picasso, Monet ou Van Gogh cela aurait été trop facile et puis on m’aurait taxée de prétentieuse. (ça arrive …)
Et pourtant c’est exactement la même chose, si ça marche
avec eux, ça doit marcher aussi pour les aquarellistes.
Donc prétendre qu’une sélection est anonyme me semble un
véritable affront pour les artistes et pour l’art.
C’est un peu comme dire un
mensonge vrai.
Connaître le nom d’un artiste qui envoie sa sélection est
important, car chaque artiste a aussi sa propre histoire, son parcours qu’il
peut ainsi revendiquer en disant qu’il est le créateur de son travail. Lui et
pas un autre.
Cette reconnaissance me semble primordiale dans le sens où l’on
a pu un jour passer à côté d’un peintre sans le remarquer et pouvoir découvrir
quelques années plus tard qu’il s’est révélé, qu’il s’est trouvé un style.
C’est toujours intéressant de participer à cette démarche et
d’accompagner des artistes ainsi. Et il me semble que cela fait parti des
compétences et des devoirs des organisateurs de salon.
Si la sélection est anonyme comment y associer un parcours,
une personnalité ?
En marge d’une œuvre il y a son créateur, une personne, une
personnalité et n’est –ce pas cela aussi qui contribue à ce que l’on adhère
totalement ou juste un peu ou pas du tout à l’œuvre elle-même ?
Pour ma part, j’en suis persuadée.
Il n’est pas question de « copinage » dans cette
notion de l’œuvre et de l’artiste ( je sens venir les contradicteurs ), le jury
qui sélectionne anonymement revendique justement cette manière de procéder pour
éviter le « copinage « (là encore on est un peu dans le mensonge
vrai), il est simplement question de ne pas dissocier l’artiste de son œuvre puisqu’ils
ne forment qu’un.
De tout ce qu’on peut me dire, la réflexion la plus
touchante que j’entends est : - Vous n’avez pas besoin de signer, on sait
que c’est vous quoique vous peigniez.
Je trouve cela touchant que des gens puissent éprouver le
besoin de me faire cette déclaration alors que pour moi c’est une évidence.
Ma peinture c’est moi et moi c’est ma peinture.
Et en dehors de ces considérations au passage sur ma propre
peinture (je fais toujours gaffe pour ne pas me faire traiter de prétentieuse
...), je me questionne sur ce que pourrait donner un salon de peinture où l’on
aurait sélectionné des œuvres sans connaître leurs auteurs.
Il y aurait évidemment des choses superbes, les pépites
découvertes, les œuvres connues (mais qu’on n’a pas reconnues, vous avez suivi ?),
et il y aurait le lot des « toutes pareilles », les œuvres vraiment
anonymes.
C’est un peu comme si les jurys littéraires sélectionnaient
les livres avec un bandeau sur le nom des auteurs.
Quelle valeur auraient les sélections et les prix si on
prétendait qu’ils ont été décernés en aveugle ?
Vous imaginez prétendre ne pas reconnaître un Modiano ????
Delphine de Vigan ? Cavanna ? Lionnel Duroy ? Céline ????
C’est comme l’histoire du CV anonyme.
Ça ne peut pas marcher car il y a bien un moment où l’on se
dévoile et où il faut être soi-même.
Il y avait un énorme bon sentiment dans cette idée de projet
de CV anonyme puisqu’il était destiné à protéger Ali et Nohra d’un jugement qui
aurait prévalu sur leurs valeurs intellectuelles et leurs qualités à prétendre
à un emploi.
Mais le jour où Ali ou Nohra se présentent à l’entretien d’embauche
que se passe t-il ? A mon avis la même chose exactement que s’ils avaient
mis leur nom et leur photo sur leurs CV.
On se trompe de combat : Ce n’est pas l’identité des
demandeurs d’emploi qu’il faut masquer sur les CV, ce sont les racistes qu’il
faut éduquer.
Et pour en revenir aux jurys de sélection des salons de
peinture, si l’anonymat des candidatures me semblent plus tenir de la farce et
pire de l’erreur quasi professionnelle, il existe bien heureusement des
organisateurs de salon qui font confiance aux artistes.
Dire à un artiste : – Nous vous avons sélectionné ou nous vous invitons à participer à notre salon et vous apporterez les œuvres que vous désirez et que vous avez choisies ou réalisées pour notre salon, c’est pour moi une des reconnaissances les plus sincères que l’on puisse me faire.
Dire à un artiste : – Nous vous avons sélectionné ou nous vous invitons à participer à notre salon et vous apporterez les œuvres que vous désirez et que vous avez choisies ou réalisées pour notre salon, c’est pour moi une des reconnaissances les plus sincères que l’on puisse me faire.
Me dire de cette manière que l’on me fait confiance est le
plus beau des contrats.
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