Série réalisée par Jean-Xavier de Lestrade d’après un scénario d’Antoine Lacomblez et Jean-Xavier de Lestrade.
La fiction décrit l’histoire de sept anciens otages du Bataclan. Ils en sont sortis vivants et se retrouvent régulièrement, on les suit durant sept années, jusqu’au procès.
J’en suis à la moitié, soit les quatre premiers épisodes, deux par soirée, pas d’avantage, car c’est une épreuve. C’est une série qui coupe le souffle et qui étreint la poitrine tant elle est vraie, tant elle dit la douleur du traumatisme sans détour.
La violence n’est jamais montrée dans le réalisme indécent du carnage qui a eu lieu, il y a dix ans, ce soir du 13 novembre au Bataclan, au stade de France et dans les rues de Paris, la violence est pourtant omniprésente dans ce qu'il reste de vivant chez les sept personnages qui constituent ce petit groupe surnommé « Les potages », un raccourci de ce qu’ils sont : des potes otages.
Chacun reprend sa vie comme il le peut, comme elle le peut, en réalisant très rapidement que « ça ne dure pas longtemps, la compassion. Après, c’est la solitude ». Ils entendent que « ça suffit, ce grand déballage, qu’ils doivent passer à autre chose. »
C’est chez les psys qu’ils parviennent à parler, à lâcher un peu de ce trauma qui les empêche de faire l’amour, qui les rend pénibles à vivre pour leurs proches, qui les fait pleurer sans cesse ou au contraire, qui leur a pris leurs émotions, qui leur a pris leur envie de vivre pour la remplacer par des terreurs.
La fiction de Jean-Xavier de Lestrade (qui nous avait déjà éblouis avec « Sambre » et « Laeticia ») ne cherche pas à nous faire croire que l’on peut s’en sortir avec la résilience, l’un des personnages dénonce avec fureur cette foutue résilience, pas plus qu’elle cherche à nous convaincre que l’explication ou le pardon seraient la solution, comme la justice réparatrice qui m’a toujours fait sourire. C’est un moment très juste et très émouvant, lorsque l’un des anciens otages désire rencontrer les membres de la BRI qui sont intervenus et les ont sauvés au péril de leur vie, et leur dit : « Je voudrais comprendre » et qu’un policier de la BRI, lui répond ferme et sans détour : « Il n’y a rien à comprendre, ne cherchez pas. »
J’ai longtemps cru qu’il fallait comprendre pour guérir. Ce n’est qu’après avoir réalisé qu’il n’y avait rien à expliquer que j’ai compris que « comprendre » serait un début d’excuse pour un acte qu’on ne peut pas pardonner.
Cette fiction « Des vivants » est ainsi faite, elle prend vraiment en compte le traumatisme et la parole de ceux qui sont restés vivants alors que les hommages aux morts se multiplient, car il est sans doute moins engageant de rendre hommage aux morts que de prendre en considération le traumatisme des vivants.
C’est la première fois que je regarde une fiction qui aborde une tragédie par cet angle qui est indéniablement plus juste que celui pris la semaine dernière par « Envoyé Spécial » qui nous présentait le pardon comme seule planche de salut. J’en avais été écœurée et révoltée pour les victimes.
« Des Vivants », c’est le courage de la vérité.
Ce soir sur France 2 et en streaming sur la plateforme France TV.
